Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/67

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sommer de rendre les armes, nous ne les avons pas rendues, mais tout armés nous avons campé près de lui. Que n’a-t-il pas fait, envoyant des émissaires, demandant une trêve, nous fournissant des vivres, jusqu’à ce que la trêve fût convenue ? Alors nos stratéges et nos lochages, comme tu le demandes, se sont abouchés avec lui, sans armes, sur la foi de la trêve ; et maintenant frappés, blessés, outragés, les infortunés peuvent-ils du moins obtenir la mort ? Ah ! je suis sûr qu’ils la désirent ! Et toi, qui sais tout cela, tu traites de fous ceux qui proposent de se défendre ; tu dis qu’il faut aller de nouveau supplier ? Mon avis, compagnons, c’est de ne plus admettre cet homme parmi nous ; ôtons-lui son grade, chargeons-le de son bagage, et reléguons-le parmi les skeuophores. Un homme déshonore sa patrie et la Grèce entière, lorsque, Grec, il se conduit ainsi. »

Alors Agasias de Stymphale prenant la parole : « Heureusement, dit-il, cet homme n’a rien de commun avec la Béotie ni avec le reste de la Grèce. Je l’ai vu de près ; c’est une espèce de Lydien, et il a les deux oreilles percées. » Ce qui était vrai. On le chasse donc, et les autres, se dispersant dans tous les quartiers, appellent à haute voix le stratége, si le stratége n’avait point péri ; l’hypostratége, si le stratége était mort ; le lochage, si le lochage avait échappé. Quand tout le monde est réuni, on s’assied devant les armes, stratéges et lochages, au nombre d’une centaine environ. Au moment où cela se passait, il était près de minuit.

Hiéronyme d’Élis, le plus ancien des lochages de Proxène, prit alors la parole : « Stratéges et lochages, dit-il, en jetant les yeux sur les conjonctures présentes, il nous a paru convenable de vous assembler et de vous convoquer, pour prendre, si nous pouvons, une bonne résolution. Parle, Xénophon, redis à ton tour ce dont tu nous as fait part. »

Alors Xénophon commence en ces mots : « Nous savons tous que le roi et Tissapherne ont fait arrêter autant de nos compagnons qu’ils ont pu ; quant aux autres, il est clair qu’ils leur tendent des piéges pour les faire périr, s’ils le peuvent. Nous devons donc, selon moi, mettre tout en œuvre pour ne pas tomber entre les mains des barbares, mais plutôt pour les faire tomber, si nous pouvons, entre les nôtres. Sachez du reste que tous, tant que vous êtes, en ce moment réunis ici, vous avez la plus belle occasion. Tous les soldats ont les yeux tournés sur vous. S’ils vous voient découragés, ils se conduiront tous en lâches ; mais si vous paraissez disposés à marcher contre les en-