Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/69

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vous qui manquent de chefs en choisissent, puis, le choix fait, venez au milieu du camp et amenez-y celui que vous aurez choisi : ensuite convoquons tous les autres soldats : que le héraut Tolmidès soit près de nous ! » À ces mots il se lève, pour qu’il n’y ait aucun délai et qu’on exécute ce qu’il faut faire. On élit alors les chefs : au lieu de Cléarque, Timasion de Dardanie ; au lieu de Socrate, Xanticlès d’Achaïe ; à la place d’Agias, Cléanor d’Arcadie ; au lieu de Ménon, Philésius d’Achaïe ; à la place de Proxène, Xénophon d’Athènes.


CHAPITRE II.


Discours de Chirisophe, de Cléanor et de Xénophon.


Après l’élection, le jour commençant à poindre, les chefs se rendent au centre du camp et conviennent de placer des gardes en avant et de convoquer les soldats. Les soldats réunis, Chirisophe de Lacédémone se lève et parle ainsi : « Soldats, les circonstances sont critiques, depuis que nous sommes privés de nos stratéges, de nos lochages et de nos soldats ; de plus, Ariée, qui était notre allié, nous a trahis. Il faut cependant sortir de là en hommes de cœur. Au lieu de nous décourager, essayons de nous en tirer, si nous pouvons, par une belle victoire ; sinon, mourons bravement plutôt que de tomber vivants aux mains des ennemis : car je crois que nous souffririons des maux que puissent les dieux réserver à nos ennemis ! »

Alors Cléanor d’Orchomène se lève et parle ainsi : « Oui, vous voyez, soldats, le parjure du roi et son impiété ; vous voyez la perfidie de Tissapherne, lui qui, après vous avoir dit qu’il était voisin de la Grèce, et qu’il voulait avant tout nous sauver, après avoir fait les mêmes serments que nous et nous avoir donné la main, nous trahit et arrête nos généraux. Il n’a pas même respecté Jupiter Hospitalier ; mais il a fait asseoir Cléarque à sa table, pour mieux les tromper, et les a fait mettre à mort. Et Ariée, que nous avons voulu créer roi, à qui nous avons donné notre foi, en recevant la sienne, que nous ne nous trahirions point, cet homme, sans crainte des dieux, sans respect pour la mémoire de Cyrus, de Cyrus qui, de son vivant, l’avait comblé d’honneurs, le voilà maintenant passé du côté des plus cruels ennemis de son bienfaiteur, en essayant de nous