Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/142

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Bordeaux pour les plaisirs, fut élevé à ses frais, moyennant 270,000 livres.

Le nouveau moulin à farine et qui marche par les marées, qu’une compagnie vient de construire, mérite d’être visité. Un grand canal creusé sous le bâtiment et revêtu de murs en pierres de taille, de quatre pieds d’épaisseur, reçoit la marée montante et la jette sur les roues ; de là d’autres canaux également soignés la mènent à un réservoir d’où, en s’écoulant aux reflux, elle produit encore du mouvement. Trois de ces canaux passent sous le bâtiment, qui contient vingt-quatre paires de meules. Ces travaux sont admirablement exécutés pour la solidité et la durée. On estime la dépense à huit millions de livres (350,000 l. st) ; je ne saurais croire que l’on aventurât ainsi une pareille somme. De combien une à machine à vapeur, pour faire le même ouvrage, eût été plus économique, c’est ce que je ne rechercherai pas ; mais je craindrais que les moulins ordinaires de la Garonne, qui n’exigent pas de si énormes dépenses pour marcher, n’arrivent, par le cours habituel des choses, à ruiner la compagnie.

Les constructions s’élevant dans tous les quartiers de la ville indiquent sa prospérité à ne pouvoir s’y méprendre. Dans les faubourgs on fait de nouvelles rues, d’autres sont déjà tracées et en partie bâties. Elles se composent en général de petites ou de médiocres habitations, pour les commerçants de classe inférieure. Toutes sont en pierre blanche, et, une fois finies, ajoutent beaucoup à la beauté de la ville. Je me suis enquis de la date de ces nouvelles rues : elles ne remontent pas à plus de quatre ou cinq ans, c’est-à-dire à la paix ; et de la couleur de la pierre des constructions immédiatement antérieures, on voit que cette activité avait cessé pendant la guerre. Depuis la paix