Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/356

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patois. Voyant cependant qu’ils hésitaient encore, et que le nom du comte d’Entragues revenait souvent sur leurs lèvres, j’ouvris un paquet de lettres scellées, en disant : « Voici, Messieurs, mes lettres de recommandation pour différentes villes de France et d’Italie, ouvrez celle qu’il vous plaira, et vous verrez, car elles sont écrites en français, que je suis un honnête fermier d’Angleterre, et non pas le scélérat que vous vous êtes imaginé. » Là-dessus, nouveau débat qui se termina en ma faveur, ils refusèrent d’ouvrir mes lettres, et se préparèrent à me quitter. Mes questions si nombreuses sur les terres, mon examen détaillé d’un champ après que j’avais prétendu n’être venu que pour les volcans, tout cela avait élevé des soupçons qui, me firent-ils remarquer, étaient très naturels lorsque l’on savait à n’en pouvoir douter que la reine, le comte d’Artois et le comte d’Entragues conspiraient contre le Vivarais. À ma grande satisfaction, ils me souhaitèrent une bonne nuit et me laissèrent aux prises avec les punaises qui fourmillaient dans mon lit comme des mouches dans un pot de miel. Je l’échappai belle, c’eût été une position délicate d’être jeté dans quelque prison commune, ou au moins gardé à mes frais jusqu’à ce qu’un courrier envoyé à Paris apportât des ordres, moi payant les violons. — 20 milles.

Le 20. — Mêmes montagnes imposantes jusqu’à Villeneuve-de-Berg. La route, pendant un demi-mille, passe au-dessous d’une immense masse de lave basaltiques, offrant différentes configurations et reposant sur des colonnes régulières ; au centre s’avance un grand promontoire. La hauteur, la forme, le caractère volcanique, pris par toute cette masse, présentent un spectacle magnifique aux yeux du vulgaire comme à ceux