Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/156

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quand on vous parlera de Lorenzo le maudit."

Elle tendit sa main… Il la baisa. Elle franchit la porte. Il se tenait courbé devant elle.

"Écoutez, dit-elle. Jamais je n’oublierai ce que je vous dois. Si jamais vous êtes menacé, si vous redoutez quelque catastrophe, si vous êtes fugitif venez à moi, en quelque temps que ce soit.

— Soit ! fit-il, non sans une sourde ironie. Mais à qui m’adresserai-je pour vous trouver ?"

La jeune fille répondit :

"Il suffira que vous allier frapper cinq coups consécutifs à la porte de l’hôtel situé tout au bas de la rue Dauphine. C’est l’hôtel de mon père. On vous ouvrira et on vous cachera dans une retraite sûre. Je m’appelle Giselle, monsieur, et mon père est le comte d’Auvergne, duc d’Angoulême."

Elle s’enfuit légèrement, disparut dans la nuit. Le nain demeura sur place, foudroyé, hébété de stupeur. Puis il éclata d’un rire strident, sinistre, et gronda :

"Dire que je n’avais qu’à la pousser quand j’ai ouvert la fenêtre !"

Puis, pensif d’une formidable rêverie, il referma la porte, la cadenassa, la verrouilla, la barricada, et remonta à son laboratoire. Il s’assit sur un escabeau et se mit à rêver. Lorsqu’il revint au sentiment des choses, il s’aperçut qu’il faisait jour.


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Giselle s’était rapidement dirigée vers la rue Dauphine. C’était à peu près le moment où Léonora Galigaï se préparait à marcher vers la chambre du roi. Giselle descendit la rue son poignard à la main. Elle atteignit sans encombre la porte de l’hôtel, appuya sur le mot qui formait ressort et, le cœur battant, pénétra dans l’intérieur.

Cette date du 22 août, elle la connaissait. Elle savait que le duc d’Angoulême et ses amis devaient être réunis cette nuit-là dans les souterrains de l’hôtel. Elle se jeta donc en courant dans le long couloir au bout duquel brillait la pâle lumière indicatrice. A mesure qu’elle avançait, il lui semblait entendre une sourde rumeur qui montait des entrailles du sol... puis cette rumeur se précisa... elle perçut des voix furieuses, un cliquetis d’épées… on se battait !

"Mon père est découvert ! haleta Giselle. Eh bien ! la place d’une fille telle que moi est à ses côtés dans la bataille !"

Elle bondit dans l’escalier qui s’enfonçait vers les caves. Et,