Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/185

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— C’est pardieu vrai. Mais comment as-tu fait ? Assieds-toi, Cogolin, assieds-toi, je le veux, ajouta le chevalier en se rappelant que le roi l’avait fait asseoir devant lui. Assieds-toi, corbacque !

— Merci, monsieur. Voici donc..." dit Cogolin, qui avait fini par s’asseoir devant le verre que le chevalier venait de lui remplir.

Voici en résumé ce que l’écuyer raconta à son maître. Cogolin, au moment où Capestang s’était éloigné pour se mettre à la recherche d’un peu de ce métal sans lequel il est peut-être possible d’être heureux, mais non de dîner dans une auberge, Cogolin s’était dirigé tout droit vers la salle commune du Grand-Henri, après avoir jeté sa perruque dans un coin. Son entrée provoqua un éclat de rire général parmi les buveurs et les servantes. Au bruit de ce rire ; maître Lureau accourut. Mais il ne partagea pas l’hilarité de ses clients et valets. Au contraire, il considéra Cogolin sans cheveux avec une sympathie qu’il n’avait jamais témoignée à Cogolin chevelu. Maître Lureau, on se le rappelle, était parfaitement chauve.

"Au moins, se dit-il, je ne serai plus seul. À deux, on supporte mieux l’infortune et les quolibets."

Et il chercha à se rapprocher de Cogolin pour lui faire son compliment. Mais Cogolin qui, du coin de l’œil le guettait comme le chat guette la souris, traversa la grande salle d’un air préoccupé et se dirigea vers la porte de sortie, où Lureau le rejoignit au moment où il mettait le pied sur les marches du perron.

"Ah ! monsieur Cogolin, s’écria-t-il en prenant une physionomie de condoléances, qu’est-il arrivé à vos cheveux ?

— Peuh ! fit Cogolin d’un air très détaché. J’ai perdu mes cheveux cette nuit à la suite d’une forte émotion, c’est vrai, mais...

— Comment ! En une seule nuit ? interrompit l’hôte.

— Oui. C’est comme cela que je les perds toujours, moi. Une peur, un mauvais rêve et mes cheveux tombent en une heure de temps, mais...

— Voilà qui est étrange. Moi, il m’a fallu des années, dit Lureau en passant sa main sur son crâne poli, et en soupirant. Mais vous venez de dire : « C’est comme cela que je les perds toujours. »

— Sans doute... C’est que vous êtes plus lent que moi en besogne Moi, il ne me faut qu’une heure.

— La chose vous est donc déjà arrivée ? fit l’hôte en ouvrant des yeux énormes.

— C’est la cinquième ou sixième fois. Parallaxis, Asclèpios, Catachrèsis.

— Plaît-il ?

— Je dis : Parallaxis, Asclèpios, Catachrèsis. Ce sont trois