Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/21

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allait saisir Giselle, son cheval vacilla, frappé au poitrail, et s’abattit avec un hennissement de douleur. Et il vit Capestang, l’épée à la main, devant la monture de Giselle.

"Garde à vous, monseigneur ! vociférèrent les acolytes de Concini, qui, après le premier moment de stupeur, se jetaient en masse serrée sur le jeune homme.

— Sus ! sus ! Pas de quartier !

— Fuyez, mademoiselle, dit Capestang qui, d'un coup d'épée, écarta le plus avancé.

— Non ! répondit doucement Giselle.

— A mort ! A mort ! hurlèrent les forcenés, fous de rage.

— Vous allez me faire tuer, reprit Capestang, qui para un coup destiné à lui fendre le crâne.

— Prenez-le vivant ! rugit Concini, qui, excellent cavalier, était retombé sur ses pieds.

— Tandis que, seul, je puis m'en tirer, continua le jeune homme. À vous, monsieur ! Vous êtes mort."

Un homme tomba. Deux autres étaient blessés. Concini défaillait de fureur. Et dans ce tumulte, dans le choc et l’éclair des épées, parmi les jurons et les vociférations au centre de ces visages flamboyants, c’était étrange et sublime, c’était digne des épopées homériques, cet entretien paisible de Giselle et de Capestang. Giselle, pâle comme une morte, se pencha vers le jeune homme au moment où celui-ci déjà tout déchiré, tout sanglant, se redressait après un coup droit.

"Sangdieu ! Mordieu ! Corps du Christ ! – Il a le diable au corps ! – Mort de tous les diables, nous le pendrons ! – Nous l’écorcherons vif !

— Mademoiselle, râla Capestang, si vous restez une minute de plus, je suis mort !

— Adieu donc, murmura-t-elle, adieu. Peut-être ne vous reverrai-je jamais, mais vous vivrez, là, tant que je vivrai."

La jeune fille plaça la main sur son sein palpitant, et Capestang se sentit frémir jusqu’à l’âme. Dans le même instant, Concini jeta un hurlement. Giselle, piquant son cheval, disparaissait dans un galop effréné.

"Sus ! sus ! Arrêtez-la ! Rinaldo, mille écus, si tu la rattrapes !

— À nous deux, Fend-l'Air !" cria Capestang.

D'un bond il fut en selle. D'un autre bond il fut au milieu du chemin. Rinaldo et ses compagnons, enchantés peut-être de s’éloigner d’un si rude jouteur, se précipitaient à la poursuite de Giselle.

"On ne passe pas !" tonna Capestang.

Il n’avait plus qu’un tronçon d’épée à la main ; le sang lui coulait d’une épaule, et d’un bras, et d’une estafilade au cou ; il était déchiré, hagard, hérissé, flamboyant d’une sorte de folie ; les rayons du soleil filtrant à travers les feuillages le nimbaient