Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/451

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Dieu, juré à mon père d’être l’épouse du marquis de Cinq-Mars, alors que celui qui me sauvait, celui que j’aimais, celui que j’aime s’appelle Capestang !"

Le carrosse, bientôt, s’arrêta.

"Mais, madame, fit la servante, on nous a conduit rue des Barrés ! À deux pas de votre hôtel ! Ô madame, quelle confiance avez-vous en cette face de sorcier qui..."

La portière s’ouvrit à ce moment.

"Veuillez attendre quelques instants", dit la voix de Lorenzo.

Le nain se mit à frapper à la porte de la Sarcelle-d’Or. Une fenêtre s’ouvrit. Une tête effarée apparut, demandant ce qu’on voulait à pareille heure.

"Vous remettre les dix écus d’or qui vous sont dus, dame Léonarde !" fit Lorenzo.

Sans doute dame Léonarde reconnut la voix du nain, car on entendit la fenêtre se refermer en hâte, puis un bruit de bas précipités ; puis la porte s’ouvrit et l’hôtesse apparut, un flambeau à la main. Lorenzo entra dans l’auberge et y resta cinq minutes pendant lesquelles, probablement, il donna ses instructions à dame Léonarde. Puis il reparut et, comme s’il eût eu dès lors acquis le droit de commander, ordonna à la servante d’entrer dans la salle de l’auberge et d’y attendre sa maîtresse. Sur un signe de Giselle, la digne femme obéit, mais à contrecœur. Le nain pénétra dans le carrosse et s’assit en face de Giselle.

"Mon enfant, dit-il, cette voiture va demeurer toute la nuit à votre disposition. Vous vous en servirez pour vous faire transporter sur tel point de Paris que vous jugerez convenable et même hors Paris à Meudon par exemple, comme vous le disiez. Attendez ! ne m’interrompez pas ; je sais que vous ne voulez pas quitter Paris sans votre mère. Donc, il est entendu que vous avez ce carrosse pour vous porter dès cette nuit où vous le voudrez. Maintenant, mon enfant, je vais vous dire adieu. Il est probable que vous ne me reverrez plus jamais. Avant de vous quitter pour toujours, j’ai deux choses à vous demander.

— Parlez, vous qui agissez avec moi comme un père ! Parlez, fit Giselle d’une voix bouleversée d’émotion, et si ce que vous demandez est en mon pouvoir, tenez-le pour acquis.

— Ces deux choses sont en votre pouvoir, mon enfant. Jurez-moi donc de m’accorder ma double demande !

— Sur ma mère, je vous le jure !" dit Giselle.

Le nain garda un instant le silence, les yeux fixés sur Giselle, dont la tête charmante apparaissait vaguement éclairée par la lumière de l’auberge, dont la porte était restée ouverte.

"Voici donc la première, dit-il alors. Supposez - c’est une simple supposition, comprenez-moi - supposez que je vous fasse savoir dans huit jours, demain, cette nuit, enfin, dès