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LE BOUTE-CHARGE

ses fourneaux, et s’écrie en s’épongeant le front :

— Ah ! j’en ai vu bien d’autres, allez ! Vous flanchez pour si peu ? Ah ! ah ! ah !…

Et le récit se développe. Les coups de marteau vont diminuant ; les aides, les hommes venus à la forge quittent leur ouvrage ou leur cheval, s’approchent peu à peu, écoutent, émerveillés.

— Nous étions depuis la veille au soir dans un trou de village dont je n’ai jamais su le nom. Il était midi. Depuis le matin, nous avions ferré plus de vingt chevaux à neuf et cloué peut-être cinquante vieux fers. Il faut vous dire qu’on se battait en avant du trou de village en question. La satanée musique du canon allait son train. La forge était installée sur la route même. J’ai oublié de vous dire que les maisons étaient brûlées et démolies de fond en comble. De la route, nous dominions les champs. Aussi loin que la vue pouvait s’étendre, on ne voyait qu’une fumée blanche qui se déchirait à chaque instant d’éclairs rouges. Des colonnes d’infan-