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CELLE QUI M’AIME

sur ses doigts à un calcul fort compliqué.

Il tourna les yeux, et, pans quitter l’oreiller :

— Ah ! c’est vous, Monsieur, me dit-il en balbutiant. Vous devriez bien m’aider à compter les étoiles. J’en ai déjà trouvé plusieurs millions, mais je crains d’en oublier quelqu’une. C’est de la statistique seule, Monsieur, que dépend le bonheur de l’humanité.

Un hoquet l’interrompit. Il reprit en larmoyant :

— Savez-vous combien coûte une étoile ? Sûrement le bon Dieu a fait là-haut une grosse dépense, et le peuple manque de pain, Monsieur ! À quoi bon ces lampions ? Est-ce que cela se mange ? quelle en est l’application pratique, je vous prie ? Nous avions bien besoin de cette fête éternelle. Allez, Dieu n’a jamais eu la moindre teinte d’économie sociale.

Il avait réussi à se mettre sur son séant ; et promenait autour de lui des regards troubles, hochant la tête d’un air indigné. C’est alors qu’il vint à apercevoir ma compagne. Il tressaillit, et, le visage pourpre, tendit avidement les bras.

— Eh ! eh ! reprit-il, c’est Celle qui m’aime.



X


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— « Voici, me dit-elle, je suis pauvre et je fais ce que je peux pour manger. L’hiver dernier, je passais