Page:Zola - Fécondité.djvu/415

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la pièce comme si elle s’efforçait d’y rétablir un peu d’ordre, tout en venant frôler le visiteur de ses jupes, par ce besoin instinctif qu’elle paraissait avoir de s’offrir, dès qu’un homme était seul avec elle.

« Ah ! quelle maison ! continuait-elle à demi-voix, en ayant l’air de se parler à elle-même. Comme on l’abandonne, ce pauvre Monsieur !… Ça irait mieux, si Madame n’était pas occupée du matin au soir ! »

Valentine occupée ! Pour goûter toute l’ironie de cette parole, il fallait, ainsi que Mathieu, savoir qu’elle était, depuis six mois, à l’unique bonheur d’avoir renoué avec Santerre, après une rupture de trois ans bientôt. Maintenant, elle osait même le recevoir au domicile conjugal, elle s’enfermait, le gardait dans son petit salon durant des après-midi entiers, et c’était sans doute de ce qu’ils y faisaient ensemble, de ces occupations graves, que parlait si railleusement l’institutrice. Santerre, après avoir conquis Valentine de son air de tendre caresse, au temps où il la croyait indispensable à ses succès de romancier, l’avait ensuite exécutée sauvagement, d’une impitoyable brutalité d’égoïsme, quand elle lui était devenue inutile, gênante même. Désespérée de cette rupture, elle avait alors étonné ses amies par son zèle religieux, en se remettant à pratiquer ainsi qu’autrefois chez sa mère, dans cette maison des antiques Vaugelade, d’un si ardent catholicisme. Elle se retrouvait de leur sang, elle ne renonçait aux allures libres, prises parmi les compagnonnages de son mari, que pour afficher une exagération d’intolérance absurde, hantée de folies nouvelles, au nom du bon Dieu. Comme la musique de Wagner, la religion de Rome était surannée, démodée : il lui fallait la venue sanglante d’un Antéchrist pour balayer les péchés du monde. On disait bien qu’elle avait essayé d’un autre amant, mais le fait n’était pas prouvé. Séguin qui traitait la religion en simple élégance, s’était un