Page:Zola - Fécondité.djvu/463

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dans une école spéciale. Beauchêne, mis au courant, avait offert gaiement de prendre Blaise, heureux de témoigner ainsi son estime pour la fortune croissante de ses bons cousins, comme il les nommait.

Mathieu, qu’on introduisit dans le petit salon jaune de Constance, la trouva en train de prendre une tasse de thé avec Mme Angelin à leur retour de chez la sage-femme. Sans doute, l’arrivée inattendue de Beauchêne venait d’interrompre désagréablement leurs confidences émues. Sous le prétexte d’un court voyage, il rentrait de quelque coucherie, d’une de ses habituelles fringales de chair blonde, nées d’une rencontre de trottoir ; et il fatiguait les deux femmes par des mensonges bruyants, un peu ivre encore, la langue pâteuse, les yeux battus et fiévreux, bavant sans honte sa joie de vivre.

« Ah ! mon cher cria-t-il, je racontais à ces dames mon retour d’Amiens… Il y a là-bas des pâtés de canard extraordinaires. »

Puis, quand Mathieu lui parla de Blaise, il se répandit en protestations d’amitié : c’était une affaire entendue, qu’on lui amenât le jeune homme, il le mettrait d’abord avec Morange, pour qu’il pût se rendre compte du mécanisme de la maison. Et il soufflait, il crachait, exhalant cette odeur de tabac, d’alcool, de musc, qu’il rapportait de chez les filles ; tandis que sa femme, qui lui souriait affectueusement, ainsi qu’à son habitude, devant le monde, laissait par moments tomber sur lui, quand Mme Angelin tournait la tête, des regards désespérés, d’un infini dégoût.

Comme Beauchêne continuait à trop causer, avouant qu’il ne savait pas où en était la construction de la batteuse, Mathieu vit bien que Constance, inquiète, tendait l’oreille. L’entrée de Blaise dans la maison l’avait déjà rendue grave ; maintenant, elle souffrait de cette ignorance où son mari semblait être des travaux ; et puis,