Page:Zola - Fécondité.djvu/499

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« Docteur, voici une dame qui désire redevenir une jeune mariée… Elle veut un enfant, et il faut que vous lui disiez comment ça se fait. »

Le bon docteur se prêta volontiers au jeu. Il avait sa grosse face de brave homme, son doux regard, sans qu’il parût triompher le moins du monde d’une catastrophe, prévue par lui depuis longtemps. Il se contenta de rire avec gaieté.

« Un enfant, c’est parfait ! Mais vous savez aussi bien que moi comment on s’y prend.

— Ma foi, non, docteur ! reprit Beauchêne, de son air gaillard. Du moins, nous l’avons oublié, car voici bientôt un an que nous faisons tout ce qu’il faut pour en avoir un, et le cher petit s’entête à ne pas venir. »

Il eut le tort d’ajouter, sans attendre, dans le vaniteux besoin de sauver de la défaite sa responsabilité de bon mâle :

« Je crois bien qu’il y a quelque chose de détraqué chez la maman, et si nous avons recours à vous, c’est pour vous prier de voir et de raccommoder ça. »

Blessée du tour qu’il donnait à la consultation, le sang brusquement au visage, Constance, muette jusque-là, intervint, d’un ton de colère.

« Pourquoi m’accuses-tu ? En sais-tu quelque chose ?… Docteur, selon moi, c’est le père que vous aurez raison d’examiner et de soigner.

— Voyons, chère amie, je n’ai pas voulu te faire de la peine.

— De la peine, ah ! grand Dieu, qu’importe ! Je pleure maintenant les journées entières… Mais je ne veux pas que tu commences par jeter sur moi toute la cause de notre chagrin. Et, puisque tu m’y pousses, je suis bien forcée de prévenir le docteur, pour qu’il sache au moins à quoi s’en tenir sur ton compte ».

Vainement, Beauchêne tenta de la calmer. Elle s’affolait, perdait toute mesure.