Page:Zola - Fécondité.djvu/506

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— Que diriez-vous, répondit le docteur, d’un monsieur qui aurait un pommier dont il arracherait les fleurs, à chaque renouveau, et qui s’étonnerait, plus tard, de ne pas le voir produire des pommes ?… Vous avez brutalisé l’arbre, il est infécond. »

Lorsque, le surlendemain, Boutan eut examiné Constance, il se confirma dans son diagnostic, tout en ne pouvant le formuler qu’à titre d’hypothèse infiniment probable, car ces sources de la vie sont si obscures, qu’il est impossible d’y lire en pleine certitude. Il se montra très prudent, très sobre de paroles, ne voulant pas la jeter d’un coup au complet désespoir. Un instant, il eut même l’air d’accueillir ses récriminations sur son mari, que les désordres les fatigues de sales amours avaient pu briser, user avant l’âge. En tout cas, elle était bien forcée de mettre son unique espérance de fécondité en cet homme, solide encore, malgré le gaspillage de son existence. Et il finit par lui faire admettre, chez elle, un dérangement d’organe, des troubles qu’il allait soigner, guérir sans doute. Ce serait évidemment très long, il faudrait avoir de la patience. Lui-même espéra d’abord s’être trompé, se trouver simplement devant un état congestif, dont il serait vainqueur par une médication opiniâtre. Un jour pourtant, comme il laissait échapper le mot grave d’occlusion, elle s’effara, il dut rattraper le terme. Et des mois s’écoulèrent, des soins qu’il lui donnait deux fois par semaine, tout un traitement religieusement suivi dans une attente anxieuse qui, chaque mois, aboutissait à la même déception, à des crises grandissantes d’affreux découragement.

Un moment devait venir où Constance n’aurait plus confiance en ce docteur dont la science ne pouvait même pas la rendre mère. Elle le trouva trop doux, de médication trop prudente, de moyens trop corrects. Puis, elle le sentait évasif, elle devinait qu’il l’endormait avec des promesses