Page:Zola - Fécondité.djvu/527

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rupture avec Santerre, un jour de furieux désespoir où elle venait une fois de plus de congédier d’un coup tous ses domestiques, Valentine la vit tomber chez elle, si repentante, l’air si dévoué, si sérieux, qu’elle en fut touchée. Quand elle lui rappela sa faute, elle la fit pleurer, en lui demandant de jurer devant Dieu de ne jamais se laisser reprendre ; car Céleste se confessait, communiait à présent, apportait même du curé de Rougemont un certificat de piété profonde et de haute moralité. Ce certificat acheva de décider Valentine, qui comprit quelle aide précieuse elle allait avoir en cette fille, dans son horreur croissante à vivre chez elle, lasse des tracas de la maison. C’était bien sur cet abandon du pouvoir entre ses mains que Céleste comptait. Deux mois plus tard, elle avait, en favorisant l’excès de ses pratiques religieuses, achevé de pousser Lucie au couvent. Gaston n’apparaissait plus que les jours de permission. Andrée restait donc seule au logis, gênante encore, empêchant par sa présence le grand pillage rêvé. Et la femme de chambre était ainsi devenue l’ouvrière la plus active du mariage de Mademoiselle.

Ambroise, d’ailleurs, avait conquis Andrée, dans son universelle conquête. Depuis un an déjà, elle le rencontrait chez l’oncle du Hordel, avant que celui-ci eût l’idée de les marier. C’était une grande enfant très douce, un petit mouton blond, comme l’appelait sa mère. Ce beau jeune homme souriant, si tendre pour elle, était devenu sa pensée, un espoir où elle aimait à se réfugier, lorsqu’elle souffrait trop de solitude et d’abandon. Elle n’était plus battue par son frère, mais elle avait senti croître le malaise de la famille détruite, elle se savait mise en péril par tout ce qui l’entourait de honteux et de louche, sans qu’elle en eût la nette conscience. Aussi, lorsque son oncle, rêvant son œuvre de salut, l’avait questionnée prudemment sur le mariage, sur Ambroise,