Page:Zola - Fécondité.djvu/633

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et peut-être qui était sa mère, le tout noyé de commérages, d’inventions saugrenues. Seulement cela ne suffisait pas, Mathieu fut amené, pour comprendre comment le garçon avait eu l’adresse, à l’hypothèse qu’il la tenait de la Couteau, mise au courant de bien des choses par Céleste ; car il eut la preuve, à la maison Broquette qu’un jeune homme trapu, de mâchoires brutales, était venu deux fois y causer avec la meneuse. Sans doute, des faits restaient inexpliqués, l’aventure s’agitait dans cette ombre tragique des bas-fonds parisiens, dont il n’est pas sain de remuer la boue. Il finit par se contenter de se rendre compte, en gros, de l’affaire, pris d’effroi lui-même devant le dossier déjà lourd des deux bandits lâchés sur le pavé de la grande ville, vivant de hasards, traînant leur paresse et leur vice. Et il n’eut qu’une certitude consolante, ce fut que, si la mère, Norine, était connue, le nom et la situation du père, Beauchêne, n’étaient certainement soupçonnés de personne.

Lorsque Mathieu revit Norine, il la terrifia par les quelques détails qu’il dut lui donner.

« Oh ! je vous en supplie, je vous en supplie, qu’il ne revienne pas ! Trouvez un moyen, empêchez-le de revenir… Ça me fait trop de mal de le voir. »

Naturellement, Mathieu n’y pouvait rien. Et tout son effort après de mûres réflexions, devait se restreindre à empêcher Alexandre de découvrir Beauchêne. Ce qu’il avait appris du garçon était si gros, si bassement douloureux, qu’il voulait éviter à Constance elle-même l’affreux scandale d’un tel chantage. Il la voyait blêmir devant l’ignominie de cet enfant, qu’elle avait si passionnément souhaité, cherché, dans la perversion de son amour trahi ; et il était pris de honte pour elle, il jugeait nécessaire et pitoyable d’ensevelir le secret en un silence de tombe. Mais ce ne fut pas sans un long combat, car il trouvait dur aussi d’abandonner le misérable au pavé. Était-il