Page:Zola - Fécondité.djvu/721

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un jouisseur. Maintenant, avalez vite votre café, et filons. »

Ils arrivèrent à Janville par le train de deux heures. Leur plan fut de se rendre d’abord à Chantebled, pour qu’Ambroise et Denis pussent causer avant tout avec Gervais, le sachant d’humeur plus douce, espérant trouver, près de lui, un terrain de conciliation. Ensuite, ils iraient chez Grégoire, le sermonneraient, lui imposeraient les conditions de paix, réglées d’une commune entente. Mais, à mesure qu’ils s’approchaient de la ferme, les difficultés de la tâche leur apparaissaient, grossies, inquiétantes. Certainement, ce ne serait point aussi commode qu’ils avaient pu le croire. Et ils s’apprêtaient à la plus dure des batailles.

« Si nous montions tout de suite voir maman, proposa Denis. Nous l’embrasserions, ça nous donnerait du courage. »

Ambroise trouva l’idée excellente.

« Oui, montons, d’autant plus que maman a toujours été de bon conseil. Elle doit avoir son idée. »

Ils montèrent au premier étage de la maison d’habitation, dans la vaste pièce où Marianne vivait enfermée, allongée près de la fenêtre. Et ce fut une stupeur, elle était assise sur sa chaise longue, elle avait devant elle Grégoire, qui lui tenait les deux mains, tandis que, de l’autre côté, Gervais et Claire, debout, riaient doucement.

« Eh bien ! quoi donc ? cria Ambroise abasourdi, la besogne est faite !

— Et nous qui désespérions de la faire ! » déclara Denis, avec un geste effaré.

Mathieu, stupéfait comme eux, dans son ravissement, expliqua la situation, en voyant la surprise que causait l’arrivée brusque des deux grands frères de Paris.

« Mais c’est moi qui, ce matin, suis parti les chercher