Page:Zola - Fécondité.djvu/749

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et de beauté. Il disait Djenné, l’ancienne ville reine, au peuple, aux monuments venus d’Égypte, qui règne encore sur la vallée. Il disait les quatre autres centres, Bamako, Niamina, Ségou, Sansanding, gros villages qui seront de grandes cités un jour. Il disait surtout Tombouctou la glorieuse, si longtemps inconnue, voilée de légendes, telle qu’un paradis défendu, avec son or, son ivoire, ses jolies femmes complaisantes, se levant comme un mirage de jouissances inaccessibles, au-delà des sables dévorants. Il disait Tombouctou, la double porte du Sahara et du Soudan, la ville frontière où la vie aboutissait, se mêlait, s’échangeait, où le chameau des sables apportait les armes, les marchandises d’Europe, ainsi que le sel indispensable, où les pirogues du Niger débarquaient l’ivoire précieux, l’or qu’on ramassait à fleur de terre, les plumes d’autruche, les gommes, les céréales, toutes les richesses de la vallée féconde. Il disait Tombouctou entrepôt, Tombouctou métropole et marché de l’Afrique centrale, avec ses tas d’ivoire, ses tas d’or vierge, ses sacs de riz, de mil, d’arachides, ses pains d’indigo, ses bouquets de plumes d’autruche, ses métaux, ses dattes, ses étoffes, sa quincaillerie, son tabac, ses plaques de sel surtout, des dalles de sel gemme, apportées à dos de bête de l’effrayante Taoudéni, la cité saharienne du sel, dont la terre est de sel sur des lieues, mine infernale de ce sel qui est à ce point précieux, dans le Soudan, qu’il sert aux échanges, comme une monnaie, plus utile que l’or. Enfin, il disait Tombouctou déchue, appauvrie, l’opulente et la resplendissante cité d’autrefois qui paraît aujourd’hui en ruine, qui cache derrière ses façades lépreuses, dans la crainte des voleurs du désert, les débris des trésors qu’elle a gardés, mais qui redeviendra demain la cité de gloire et de fortune, assise royalement entre le Soudan, grenier d’abondance, et le Sahara, route de l’Europe, lorsque la