Page:Zola - La Débâcle.djvu/289

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bien, vous lui avez cassé la patte, et le voilà qui gigote dans son sang.

Weiss, un peu pâle, regardait. Il murmura :

— Finissez-le.

— Gâcher une balle, ah ! non, par exemple ! Vaut mieux en démolir un autre.

Les assaillants devaient avoir remarqué ce tir redoutable, qui partait des lucarnes du grenier. Pas un homme ne pouvait avancer, sans rester par terre. Aussi firent-ils entrer en ligne des troupes fraîches, avec l’ordre de cribler de balles la toiture. Dès lors, le grenier devint intenable : les ardoises étaient percées aussi aisément que de minces feuilles de papier, les projectiles pénétraient de toutes parts, ronflant comme des abeilles. À chaque seconde, on courait le risque d’être tué.

— Descendons, dit le capitaine. On peut tenir encore au premier.

Mais, comme il se dirigeait vers l’échelle, une balle l’atteignit dans l’aine et le renversa.

— Trop tard, nom d’un chien !

Weiss et Laurent, aidés du soldat qui restait, s’entêtèrent à le descendre, bien qu’il leur criât de ne pas perdre leur temps à s’occuper de lui : il avait son compte, il pouvait tout aussi bien crever en haut qu’en bas. Pourtant, dans une chambre du premier étage, lorsqu’on l’eut couché sur un lit, il voulut encore diriger la défense.

— Tirez dans le tas, ne vous occupez pas du reste. Tant que votre feu ne se ralentira point, ils sont bien trop prudents pour se risquer.

En effet, le siège de la petite maison continuait, s’éternisait. Vingt fois elle avait paru devoir être emportée dans la tempête de fer dont elle était battue ; et, sous les rafales, au milieu de la fumée, elle se montrait de nouveau debout, trouée, déchiquetée, crachant quand même des balles par chacune de ses fentes. Les assaillants exaspérés