Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/305

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en lac. Dans notre cour, l’eau atteignit bientôt un mètre. Je la voyais monter ; mais j’affirmais qu’elle restait stationnaire, j’allais même jusqu’à prétendre qu’elle baissait.

— Te voilà forcé de coucher ici, mon garçon, dis-je en me tournant vers Gaspard. À moins que les chemins ne soient libres dans quelques heures… C’est bien possible.

Il me regarda, sans répondre, la figure toute pâle ; et je vis ensuite son regard se fixer sur Véronique, avec une angoisse inexprimable.

Il était huit heures et demie. Au dehors, il faisait jour encore, un jour blanc, d’une tristesse profonde sous le ciel pâle. Les servantes, avant de monter, avaient eu la bonne idée d’aller prendre deux lampes. Je les fis allumer, pensant que leur lumière égaierait un peu la chambre déjà sombre, où nous nous étions réfugiés. Tante Agathe, qui avait roulé une table au milieu de la pièce, voulait organiser une partie de cartes. La digne femme, dont les yeux cherchaient par moments les miens, songeait surtout à distraire les enfants. Sa belle humeur gardait une vaillance superbe ; et elle riait pour combattre l’épouvante qu’elle sentait grandir autour d’elle. La partie eut lieu. Tante Agathe plaça de force à la table Aimée, Véronique et