Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/54

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table, croyant que tous ces soldats allaient tirer leurs sabres et se massacrer. Cependant, Doucet et Morandot avaient saisi le capitaine par les bras, pour l’empêcher de sauter à la gorge du major ; et ils l’emmenaient doucement vers la porte. Dehors, ils le calmèrent un peu, en donnant tous les torts à Laguitte. Le colonel prononcerait, car le soir même ils iraient lui soumettre le cas, comme témoins de l’affaire. Quand ils eurent éloigné Burle, ils rentrèrent dans le café, où Laguitte, très ému, des larmes sous les paupières, affectait un grand calme en achevant son bock.

— Écoutez, major, dit le chef de bataillon, c’est très mal… Le capitaine n’a pas votre grade, et vous savez qu’on ne peut l’autoriser à se battre avec vous.

— Oh ! nous verrons, répondit le major.

— Mais que vous a-t-il fait ? Il ne vous parlait seulement pas… Deux vieux camarades, c’est absurde !

Le major eut un geste vague.

— Tant pis ! Il m’embêtait.

Et il ne sortit plus de cette réponse. On n’en sut jamais davantage. Le bruit n’en fut pas moins énorme. En somme, l’opinion de tout le régiment était que Mélanie, enragée d’avoir été lâchée par le