Page:Zola - Le Capitaine Burle et 5 autres nouvelles.djvu/78

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mère, qui veut bien les nourrir et les loger, mais qui garde sur elle par prudence les clefs des armoires.

Tout ce monde habite un vaste appartement de la rue de Turenne, au Marais. Madame Guérard a soixante-huit ans. Avec l’âge, les manies sont venues. Elle exige, chez elle, une tranquillité et une propreté de cloître. Elle est avare, compte les morceaux de sucre, serre elle-même les bouteilles entamées, donne le linge et la vaisselle au fur et à mesure des besoins du service. Ses fils sans doute l’aiment beaucoup, et elle a gardé sur eux, malgré leurs trente ans et leurs sottises, une autorité absolue. Mais, quand elle se voit seule au milieu de ces trois grands diables, elle a des inquiétudes sourdes, elle craint toujours des demandes d’argent, qu’elle ne saurait comment repousser. Aussi a-t-elle eu soin de mettre sa fortune en propriétés foncières : elle possède trois maisons dans Paris et des terrains du côté de Vincennes. Ces propriétés lui donnent le plus grand mal ; seulement, elle est tranquille, elle trouve des excuses pour ne pas donner de grosses sommes à la fois.

Charles, Georges et Maurice, d’ailleurs, grugent la maison le plus qu’ils peuvent. Ils campent là,