Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/101

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du tout à une science absolue, j’estime que tout peut se réaliser, au théâtre comme ailleurs. De là, nos divergences. Mais je suis bien tranquille, M. Sarcey se flatte d’apprendre chaque jour et de se laisser convaincre par les faits. Il sera convaincu par le fait naturaliste comme il vient de l’être par le fait romantique, sur le tard.

La question des décors et des accessoires est un excellent terrain, circonscrit et nettement délimité, pour y porter l’étude des conventions au théâtre. En somme, les conventions sont la grosse affaire. On me dit que les conventions sont éternelles, qu’on ne supprimera jamais la rampe, qu’il y aura toujours des coulisses peintes, que les heures à la scène seront comptées comme des minutes, que les salons où se passent les pièces n’auront que trois murs. Eh ! oui, cela est certain. Il est même un peu puéril de donner de tels arguments. Cela me rappelle un peintre classique, disant de Courbet : « Eh bien ! quoi ? qu’a-t-il inventé ? est-ce que ses figures n’ont pas un nez, une bouche et deux yeux comme les miennes ? »

Je veux faire entendre qu’il y a, dans tout art, un fond matériel qui est fatal. Quand on fait du théâtre, on ne fait pas de la chimie. Il faut donc un théâtre, organisé comme les théâtres de l’époque où l’on vit, avec le plus ou le moins de perfectionnement du matériel employé. Il serait absurde de croire qu’on pourra transporter la nature telle quelle sur les planches, planter de vrais arbres, avoir de vraies maisons, éclairées par de vrais soleils. Dès lors, les conventions s’imposent, il faut accepter des illusions plus ou moins parfaites, à la place des réalités. Mais cela