Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/156

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Les entrées, les sorties sont réglées, elles aussi, de façon à faire un éclat. En un mot, les interprètes ne vivent pas la pièce ; ils la déclament, ils tâchent de se tailler chacun un succès personnel, sans se préoccuper le moins du monde de l’ensemble.

Voilà, en toute sincérité, mes impressions. Je me suis mortellement ennuyé à Macbeth, et je suis sorti, ce soir là, sans opinion nette sur Salvini. Dans la Mort civile, Salvini m’a transporté ; je m’en suis allé étranglé d’émotion. Certes, l’auteur de ce dernier drame, M. Giacometti, ne doit pas avoir la prétention d’égaler Shakespeare. Son œuvre, au fond, est même médiocre, malgré la belle nullité de la formule. Seulement, elle est de mon temps, elle s’agite dans l’air que je respire, elle me touche comme une histoire qui arriverait à mon voisin. Je préfère la vie à l’art, je l’ai dit souvent. Un chef-d’œuvre glacé par les siècles n’est en somme qu’un beau mort.


IV

Je me souviens d’avoir assisté à la première représentation de l’Idole. On comptait peu sur la pièce, on était venu au théâtre avec défiance. Et l’œuvre, en effet, avait une valeur bien médiocre. Les premiers actes surtout étaient d’un ennui mortel, mal bâtis, coupés d’épisodes fâcheux. Cependant, vers la fin, un grand succès se dessina. On put étudier, en cette occasion, la toute-puissance d’une artiste de talent sur le public. Madame Rousseil, non seulement sauva l’œu