Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/207

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immense, écrire la tragédie bourgeoise contemporaine, le drame réel qui se joue chaque jour sous nos yeux. Cela est autrement grand, vivant et passionnant, que les guenilles de l’antiquité et du moyen âge. Pourquoi va-t-il s’essouffler et fatalement se rapetisser dans un genre mort ? Pourquoi ne tente-t-il pas de renouveler notre théâtre et de devenir un chef, au lieu de patauger dans le rôle de disciple ? Il a de la volonté et une véritable largeur de vol. C’est ce qu’il faut avoir pour aborder le vrai, au-dessus des écoles et du raffinement des artistes simplement ciseleurs.


II

La tragédie en quatre actes et en vers, Spartacus, que M. Georges Talray vient de faire jouer à l’Ambigu, a une histoire qu’il est bon de conter pour en tirer des enseignements.

L’auteur, m’a-t-on dit, est un homme riche, bien apparenté, qui a été mordu de la passion du théâtre, comme d’autres heureux de ce monde sont mordus de la passion du jeu, des femmes ou des chevaux. Certes, on ne saurait trop le féliciter et l’encourager.

Un homme qui s’ennuie et qui songe à écrire des tragédies en quatre actes, lorsqu’il pourrait donner des hôtels à des danseuses, est à coup sûr digne de tous les respects. Pouvoir être Mécène et consentir à devenir Virgile, voilà qui dénote une noble activité d’esprit, un souci des amusements les plus dignes et les plus élev