Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/215

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e, dans une de ces lointaines époques historiques qui justifient au théâtre toutes les erreurs et toutes les fantaisies. Herbert, baron de Sept-Saulx, un burgrave selon le poncif romantique, a auprès de lui son neveu Garin, homme farouche, et un fils bâtard, Aimery, homme tendre, qu’il a eu d’une serve. Or, un jour d’ennui, Herbert, ayant fait entrer dans son château une bande d’Égyptiens, s’éprend de la belle Aïscha, qu’il épouse séance tenante. Et voilà le crime dans la maison, Aïscha pousse Garin, qui l’adore, à tuer Herbert, dont la vieillesse l’importune sans doute. Mais, au lendemain du meurtre, le soir des noces, lorsque les deux coupables vont se prendre aux bras l’un de l’autre, le spectre du vieillard se dresse entre eux, Garin a des hallucinations vengeresses qui lui montrent chaque nuit Aïscha au cou d’Herbert assassiné. Aimery, chassé par son père, revient alors comme un justicier. Il provoque Garin, il va le tuer, lorsque celui-ci revoit la terrible vision et tremble ainsi qu’un enfant. Aïscha, qui s’est empoisonnée, avoue le crime ; Garin se tue sur son cadavre ; et Aimery peut ainsi épouser une sœur de l’assassin, Alix, dont je n’ai pas parlé. Voilà.

Mon Dieu ! le sujet m’importe peu. On a fait remarquer avec raison que c’était là un mélange de Macbeth, des Burgraves et d’une autre pièce encore. La seule réponse est qu’on prend son bien où on le trouve ; Corneille et Molière ont écrit leurs plus belles œuvres avec des morceaux pillés un peu partout. Mais il faut alors apporter une individualité puissante, refondre le métal qu’on emprunte et dresser sa statue dans une attitude originale. Or, M. Paul Delair s’est contenté de ressasser toutes les situations connues,