Page:Zola - Le Naturalisme au théâtre, Charpentier, 1881.djvu/289

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au procédé de Victor Hugo. Cela me choque surtout parce que je ne crois pas à une alliance possible entre des maîtres de tempéraments différents. Les auteurs de juste milieu, ceux qui ont eu, comme Casimir Delavigne, l’ambition de concilier les extrêmes, ne sont jamais parvenus qu’à un talent bâtard et neutre n’ayant plus de sexe. C’est un peu le cas de M. de Bornier.

Le directeur de l’Odéon a monté le drame richement. Mais franchement, malgré ses soins et l’argent qu’il a dépensé, rien n’est plus triste ni plus laid que le défilé de ces costumes baroques, qu’on nous donne comme exacts. Il y a là une orgie de cheveux, de barbes et de moustaches, de l’effet le plus extravagant. Du côté des Francs, tout le monde est blond, un ruissellement de filasse ; du côté des Huns, tout le monde est brun, des poils trempés dans de l’encre et balafrant les visages comme des traits de cirage. C’est enfantin et lugubre. Quant à l’exactitude, elle me fait un peu sourire. Elle doit ressembler au respect historique de M. de Bornier. Ainsi, on a mis un entonnoir sur la tête de M. Marais. C’est très bien. Mais alors je déclare cela faible comme imagination. Du moment qu’on avait recours aux ustensiles de cuisine, je me plains qu’on n’ait pas coiffé M. Pujol d’une casserole et M. Dumaine d’un moule à pâtisserie. Remarquez que nous n’aurions pas réclamé, et que cela peut-être aurait été plus joli.

On me trouvera sans doute bien sévère pour M. de Bornier. La vérité est que nous n’avons pas le crâne fait de même. Il me paraît être la négation de l’auteur dramatique tel que je le comprends ; et comme