Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/182

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viens vous demander quelques renseignements sur les anciens baux que vous avez passés et sur les prix des locations. »

M. Landrol se mit obligeamment à sa disposition et répondit à toutes ses demandes.

Marius usait de prudence. Quand il eut causé de ceci et de cela, il en arriva habilement au véritable but de sa visite.

« Je vous remercie mille fois, dit-il, et je regrette d’avoir abusé de votre patience... Mon excuse est que je n’ai pu voir M. Authier, absent en ce moment... J’ai pensé qu’ayant traité avec lui, vous pourriez me parler de sa personne et me faire connaître ses intentions.

– Mais je n’ai pas traité avec M. Authier, répondit simplement Landrol. Je n’ai même jamais vu ce monsieur. L’affaire a été menée et terminée par M. Douglas, qui m’a fourni toutes les signatures nécessaires.

– Ah !... Je croyais que M. Authier avait visité l’immeuble, comme il est d’usage.

– Pas du tout... Ignorez-vous qu’il est en Amérique depuis plus de six mois ? M. Douglas a visité lui-même la maison et l’a acquise au nom de son client, dont il avait reçu les instructions. »

Marius se mordit les lèvres. Il avait failli laisser échapper son terrible secret. La veille, le notaire lui avait dit qu’Authier était venu de Lambesc pour chercher et choisir un immeuble. Maintenant, le mensonge était évident. Authier ne pouvait tout à la fois être depuis six mois en Amérique et attendre de l’argent à Cherbourg pour partir. Sans doute, ce personnage n’existait pas plus à Cherbourg et à New York qu’il n’existait à Lambesc. C’était une pure fiction, un pantin de fantaisie que Douglas mettait en avant dans quelque but criminel. Et Marius songea tout à coup que la procuration passée à son nom constituait un faux, entraînant la peine des travaux forcés pour le faussaire.

Il se prit à rougir, comme s’il eût été lui-même le coupable, et balbutia un nouveau remerciement à Landrol,