Page:Zola - Les Mystères de Marseille, Charpentier, 1885.djvu/283

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jeune ami. Que diable faites-vous à cette heure sur le Cours ? »

Marius, pris d’une rage sourde, serrait déjà les poings, lorsqu’il reconnut la voix de M. de Girousse.

« Vous voyez, je me promène, répondit-il en balbutiant.

– Ah ! vous vous promenez », reprit le comte d’un ton narquois.

Il regarda Fine, il regarda surtout Philippe enveloppé dans le caban.

« Voilà une tournure que je connais », murmura-t-il.

Et il ajouta avec sa brusquerie amicale :

« Voulez-vous que je vous accompagne ? Vous désirez sortir d’Aix, n’est-ce pas ?... On n’ouvre pas la porte à tout le monde. Je connais un garde. Venez. »

Marius accepta avec reconnaissance. M. de Girousse fit ouvrir la porte sans difficulté. Il n’avait plus adressé une seule parole aux jeunes gens. Quand il fut sur la place de la Rotonde, il donna une poignée de main à Marius.

« Je vais rentrer par la porte d’Orbitelle, lui dit-il. Bon voyage. »

Et il reprit à voix plus basse, en se penchant :

« C’est moi qui rirai bien demain, en voyant la mine que fera Cazalis. » Marius regarda avec émotion s’éloigner cet homme généreux qui cachait la bonté de son cœur sous des allures de bourru bienfaisant.

Isnard attendait les fugitifs avec le cabriolet. Philippe voulut conduire, pour recevoir tout l’air de la nuit au visage. Il éprouvait une volupté à sentir la légère voiture l’emporter dans l’ombre. Cette course rapide lui faisait mieux goûter les délices de la liberté.

Puis vinrent les effusions, les confidences, pendant que le cheval montait lentement les côtes. Fine et Marius avouèrent leur amour à Philippe, et lorsque celui-ci apprit qu’ils se marieraient prochainement, il devint triste. Il songeait à Blanche. Marius comprit, lui donna