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XIII

Une faillite comme on en voit beaucoup


Marius courut chez le banquier Bérard. Il ne pouvait croire à la sinistre nouvelle, il avait la foi des cœurs honnêtes. En chemin, il se disait que les bruits qui couraient n’étaient peut-être que des calomnies et il se rattachait à des espérances folles. La perte de sa fortune, en ce moment, était la perte de son frère. Il lui semblait que le hasard n’aurait point tant de cruauté : le public devait tromper, Bérard allait lui remettre son argent.

Lorsqu’il entra dans la maison de banque, une angoisse le saisit au cœur. Il vit la désolante réalité. Les bureaux étaient vides ; et ces grandes pièces désertes et calmes, avec leurs grillages fermés et leurs bureaux nus, lui parurent funèbres. Une fortune qui croule laisse on ne sait quelle désolation morne derrière elle. Il s’échappait des cartons, des papiers, de la caisse, une vague senteur de ruine. Les scellés étalaient partout leurs bandes blanches et leurs gros cachets rouges.

Marius traversa trois pièces sans trouver personne. Il découvrit enfin un commis qui était venu prendre dans un pupitre quelques objets lui appartenant. Le commis lui dit d’un ton brusque que M. Bérard était dans son cabinet.

Le jeune homme entra, frémissant, oubliant de fermer la porte. Il aperçut le banquier qui travaillait paisiblement, écrivant des lettres, rangeant des papiers,