Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/242

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Il y eut un silence.

— Oh ! je ne suis pas inquiet, reprit le père, avec son optimisme tranquille. Vous verrez que ça marchera très bien… Moi, je suis ravi. J’avais demandé à la sainte Vierge sa protection pour mes affaires, vous savez, ma grande invention des ballons dirigeables. Eh bien, si je vous disais qu’elle m’a déjà témoigné sa faveur ! Oui, hier soir, comme je causais avec l’abbé Des Hermoises, est-ce qu’il ne m’a pas offert de me trouver un bailleur de fonds à Toulouse, un de ses amis immensément riche, qui s’intéresse à la mécanique ! Tout de suite, j’ai vu là le doigt de Dieu.

Et il riait de son rire d’enfant. Puis, il ajouta :

— Un homme si charmant, cet abbé Des Hermoises ! Je vais me renseigner pour savoir si nous ne pourrions pas faire ensemble l’excursion du cirque de Gavarnie, à bon compte.

Pierre, qui voulait tout payer, l’hôtel et le reste, le poussa amicalement.

— Sans doute, ne manquez pas cette occasion de visiter les montagnes, puisque vous le désirez tant. Votre fille sera si heureuse de vous savoir heureux !

Mais ils furent interrompus, une servante leur apportait les deux tasses de chocolat, avec deux petits pains, sur un plateau garni d’une serviette ; et, comme elle avait laissé la porte ouverte, on apercevait une partie du couloir, en enfilade.

— Tiens ! on fait déjà la chambre de mon voisin, remarqua M. de Guersaint, curieux. Il est marié, n’est-ce pas ?

La servante s’étonna.

— Oh ! non, il est tout seul.

— Comment, tout seul ! mais il n’a pas cessé de remuer, et l’on causait, l’on soupirait chez lui, ce matin !

— Ce n’est pas possible, il est tout seul… Il vient de descendre, après avoir donné l’ordre qu’on fasse sa