Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/445

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Tout de suite, comme ils descendaient les rampes, le docteur Chassaigne dit à Pierre :

— Vous venez de voir le triomphe, je vais vous montrer maintenant deux grandes injustices.

Et il le mena, rue des Petits-Fossés, visiter la chambre de Bernadette, cette chambre basse et obscure, d’où elle était sortie, le jour où la sainte Vierge lui apparut.

La rue des Petits-Fossés part de l’ancienne rue du Bois, aujourd’hui rue de la Grotte, et va couper la rue du Tribunal. C’est une ruelle tortueuse, légèrement en pente, d’une grande tristesse. Les passants y sont rares, elle n’est bordée que de longs murs, de maisons misérables, de façades mornes, où pas une fenêtre ne s’ouvre. Un arbre, dans une cour, en est toute la gaieté.

— Nous y sommes, dit le docteur.

La rue, à cet endroit, s’étranglait, très resserrée, et la maison se trouvait en face d’une haute muraille grise, la muraille nue d’une grange. Tous deux, levant la tête, regardaient la petite maison qui semblait morte, avec ses croisées étroites, son crépi grossier, violâtre, d’une laideur honteuse de pauvre. En bas, l’allée s’enfonçait toute noire, une mince grille ancienne seule la fermait ; et il y avait une marche à monter, que le ruisseau, par les orages, baignait.

Le docteur reprit :