Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/493

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Il était huit heures, Marie ne tenait plus d’impatience dans la chambre, retournant sans cesse à la fenêtre, comme si, d’une haleine, elle allait boire tout le libre espace, tout le vaste ciel. Ah ! courir par les rues, par les places, aller partout, ailleurs encore, aussi loin que son désir la mènerait ! et montrer aussi combien elle était forte, avoir cette vanité de faire des lieues devant le monde, maintenant que la sainte Vierge l’avait guérie ! C’était une poussée, un envolement de son être entier, de son sang, de son cœur, irrésistible.

Mais, au moment du départ, elle décida que sa première visite, avec son père, devait être pour la Grotte, où tous deux avaient à remercier Notre-Dame de Lourdes. Ensuite, on serait libre, on aurait deux grandes heures devant soi, on se promènerait où l’on voudrait, avant qu’elle rentrât déjeuner et faire son petit paquet à l’Hôpital.

— Voyons, y sommes-nous ? répéta M. de Guersaint. Partons-nous ?

Pierre prenait son chapeau, tous les trois descendirent, parlant très haut, riant dans l’escalier, d’une gaieté d’écoliers qui entrent en vacances. Et ils gagnaient déjà la rue, lorsque, sous le porche, madame Majesté se précipita. Elle devait guetter leur sortie.

— Ah ! mademoiselle, ah ! messieurs, permettez que je vous félicite… Nous avons su la grâce extraordinaire