Page:Zola - Les Trois Villes - Lourdes, 1894.djvu/499

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— Très flatté, très honoré… Veuillez entrer, je vous prie.

Puis, dès les premiers mots que M. de Guersaint voulut lui dire, pour excuser l’homme qui l’avait conduit à Gavarnie, il se montra bienveillant. Sans doute, ce n’était pas de sa faute, à cet homme, il n’avait pas le pouvoir d’empêcher les roues de se rompre, ni les orages de tomber. Du moment que les voyageurs ne se plaignaient pas, tout allait pour le mieux.

— Oh ! s’écria M. de Guersaint, un pays admirable, inoubliable !

— Eh bien ! monsieur, puisque notre pays vous plaît, vous reviendrez nous voir, et nous n’en demandons pas davantage.

Ensuite, il s’empressa, lorsque l’architecte s’assit sur un des fauteuils, demandant à être rasé. Son garçon était encore absent, en course pour les pèlerins qu’il hébergeait, toute une famille qui emportait une caisse de chapelets, de saintes Vierges de plâtre, de gravures sous verre. On entendait venir du premier étage des piétinements éperdus, des voix violentes, une bousculade de gens que l’approche du départ affolait, au milieu d’un écroulement d’achats à emballer. Dans la salle à manger voisine, dont la porte était restée ouverte, deux enfants égouttaient les tasses de chocolat, traînant parmi la débandade du couvert. Et c’était la maison entière louée, livrée, les dernières heures de cette invasion de l’étranger, qui forçait le coiffeur et sa femme à se réfugier dans le sous-sol, une cave étroite où ils couchaient sur un lit de sangle.

Tandis que Cazaban lui frottait les joues de mousse savonneuse, M. de Guersaint le questionna.

— Eh bien ! êtes-vous content de la saison ?

— Certainement, monsieur, je n’ai pas à me plaindre. Vous entendez, mes voyageurs partent aujourd’hui ; mais j’en attends d’autres demain matin, à peine le temps de