Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/412

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Dès le lendemain, Pierre, dont l’unique pensée était d’en finir, voulut se mettre en campagne. Mais une incertitude l’avait pris : chez qui frapper d’abord, par quel personnage commencer ses visites, s’il désirait éviter toute faute, dans un monde qu’il sentait si compliqué et si vaniteux ? Et, comme, en ouvrant sa porte, il eut la chance d’apercevoir dans le corridor don Vigilio, le secrétaire du cardinal, il le pria d’entrer un instant chez lui.

— Vous allez me rendre un service, monsieur l’abbé. Je me confie à vous, j’ai besoin d’un conseil.

Il le sentait très renseigné, mêlé à tout, dans sa discrétion outrée et peureuse, ce petit homme maigre, au teint de safran, qui tremblait toujours la fièvre, et qui, jusque-là, avait presque paru le fuir, sans doute pour échapper au danger de se compromettre. Cependant, depuis quelque temps déjà, il se montrait moins sauvage, ses yeux noirs flambaient, lorsqu’il rencontrait son voisin, comme s’il était pris lui-même de l’impatience dont celui-ci devait brûler, à être immobilisé de la sorte, durant des journées si longues. Aussi n’essaya-t-il pas d’éviter l’entretien.

— Je vous demande pardon, reprit Pierre, de vous faire entrer dans cette pièce en désordre. Ce matin, j’ai encore reçu de Paris du linge et des vêtements d’hiver… Imaginez-vous que j’étais venu avec une petite valise, pour quinze jours, et voilà bientôt trois mois que je suis ici, sans être plus avancé que le matin de mon arrivée.