Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/425

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vous me feriez un chagrin immense… Mettons, si vous voulez, qu’on vous a trompé, car on ne doit rien savoir, on ne sait rien, pas plus les autres que moi… De grâce, ne parlons pas de ces choses.

Heureusement, Pierre, qui avait remarqué l’effet décisif que produisait le nom de l’assesseur du Saint-Office, eut l’idée de répondre :

— Certes, monseigneur, je n’entends pas vous occasionner le moindre embarras, et je vous répète que jamais je ne me serais permis de venir vous importuner, si monsignor Nani lui-même ne m’avait fait connaître votre nom et votre adresse.

Cette fois encore, l’effet fut immédiat. Seulement, monsignor Fornaro mit une grâce aisée à se rendre, comme à tout ce qu’il faisait. Il ne céda pas tout de suite, d’ailleurs, très malicieux, plein de nuances.

— Comment ! c’est monsignor Nani qui est l’indiscret ! Mais je le gronderai, je me fâcherai !… Et qu’en sait-il ? Il n’est pas de la congrégation, il a pu être induit en erreur… Vous lui direz qu’il s’est trompé, que je ne suis pour rien dans votre affaire, ce qui lui apprendra à révéler des secrets nécessaires, respectés de tous.

Puis, gentiment, avec ses yeux charmeurs, avec sa bouche fleurie :

— Voyons, puisque monsignor Nani le désire, je veux bien causer un instant avec vous, mon cher monsieur Froment, à la condition que vous ne saurez rien de moi sur mon rapport, ni sur ce qui a pu se faire ou se dire à la congrégation.

À son tour, Pierre eut un sourire, car il admirait à quel point les choses devenaient faciles, lorsque les formes étaient sauves. Et il se mit à expliquer une fois de plus son cas, l’étonnement profond où l’avait jeté le procès fait à son livre, l’ignorance où il était encore des griefs qu’il cherchait vainement, sans pouvoir les trouver.

— En vérité, en vérité ! répéta le prélat, l’air ébahi de