Page:Zola - Les Trois Villes - Rome, 1896.djvu/695

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— La forme, ah ! oui, reprit le cardinal avec une passion croissante, il vous a dit comme aux autres qu’intraitable sur le fond, il cédait volontiers sur la forme. Parole déplorable, diplomatie équivoque, quand elle n’est pas une simple et basse hypocrisie ! Mon âme se soulève à cet opportunisme, à ce jésuitisme qui ruse avec le siècle, qui est fait seulement pour jeter le doute parmi les croyants, le désarroi du sauve-qui-peut, cause prochaine des irrémédiables défaites ! Une lâcheté, la pire des lâchetés, l’abandon de ses armes afin d’être plus prompt à la retraite, la honte d’être soi tout entier, le masque accepté dans l’espoir de tromper le monde, de pénétrer chez l’ennemi et de le réduire par la traîtrise ! Non, non ! la forme est tout, dans une religion traditionnelle, immuable, qui depuis dix-huit cents ans a été, qui est encore, qui restera jusqu’à la fin des âges la loi même de Dieu !

Il ne put rester assis, il se leva, se mit à marcher au travers de l’étroite pièce, qu’il semblait emplir de sa haute taille. Et c’était tout le règne, toute la politique de Léon XIII qu’il discutait, qu’il condamnait violemment.

— L’unité, la fameuse unité qu’on lui fait une gloire si grande de vouloir rétablir dans l’Église, ce n’est là que l’ambition furieuse et aveugle d’un conquérant qui élargit son empire, sans se demander si les nouveaux peuples soumis ne vont pas désorganiser son ancien peuple, jusque-là fidèle, l’adultérer, lui apporter la contagion de toutes les erreurs. Et, si les schismatiques d’Orient, si les schismatiques des autres pays, en rentrant dans l’Église catholique, la transforment fatalement, à ce point qu’ils la tuent, qu’ils en fassent une Église nouvelle ? Il n’y a qu’une sagesse, n’être que ce qu’on est, mais être solidement… De même, n’est-ce pas à la fois un danger et une honte, cette prétendue alliance avec la démocratie, cette politique que suffit à condamner l’esprit séculaire de la papauté ? La monarchie est de