Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/129

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déjà vers la chambre. Alors, d’un bond, elle se mit devant la porte, en criant :

— Vous n’entrerez pas… Je suis ici chez moi, et je vous défends d’entrer !

Frémissante, grandie, elle gardait la porte. Un instant, ils restèrent immobiles, sans une parole, les yeux dans les yeux. Lui, le cou tendu, les mains en avant, allait se jeter sur elle, pour passer.

— Ôtez-vous de là, murmura-t-il d’une voix rauque. Je suis plus fort que vous, j’entrerai quand même.

— Non, vous n’entrerez pas, je ne veux pas.

Follement, il répétait :

— Il y a un homme, il y a un homme…

Elle, ne daignant même pas lui donner un démenti, haussait les épaules. Puis, comme il faisait encore un pas :

— Eh bien ! mettons qu’il y ait un homme, qu’est-ce que cela peut vous faire ? Ne suis-je pas libre ?

Il recula devant ce mot qui le cinglait comme un soufflet. En effet, elle était libre. Un grand froid le prit aux épaules, il sentit nettement qu’elle avait le rôle supérieur, et que lui jouait là une scène d’enfant malade et illogique. Il