Page:Zola - Nouveaux contes à Ninon, 1893.djvu/207

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tière de la royauté, les morts ont des floraisons étranges.

Mais il faut entendre la Sarcleuse raconter l’histoire de ces herbes. Elles n’ont pas poussé à toutes les époques avec la même sève. Sous Charles X, elles étaient encore timides ; elles s’étendaient à peine comme un gazon léger, tapis de verdure tendre qui amollissait les pavés sous les pieds des dames. La cour venait encore au château, les talons des courtisans battaient le sol, faisaient en une matinée la besogne qui demande à la Sarcleuse un grand mois. Sous Louis-Philippe, les herbes se durcirent ; le château, peuplé des fantômes paisibles du Musée historique, commençait à n’être plus que le palais des ombres. Et ce fut sous le second empire que les herbes triomphèrent ; elles grandirent impudemment, prirent possession de leur proie, menacèrent un instant de gagner les galeries, de verdir les grands et les petits appartements.

_____


J’ai rêvé, à voir la Sarcleuse s’en aller lentement, le tablier plein d’herbe, courbée dans sa vieille jupe d’indienne. Elle est la dernière pitié