Page:Zola - Travail.djvu/248

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Elle m’aime bien, et je l’aime bien, depuis que nous sommes camarades.  »

Luc ne voulut pas sourire. Mais, dans son cœur attendri, toute une vision se levait, ces enfants des deux classes fraternisant, par-dessus les clôtures, jouant et riant ensemble, au milieu des haines et des luttes qui séparaient les pères. La paix future de la Cité allait-elle donc fleurir en eux  ?

«  Il est possible, dit-il, que Nise soit charmante et que vous vous entendiez très bien  ; seulement, il est convenu qu’elle doit rester chez elle, et vous autres, chez vous, pour que personne ne se plaigne.  »

Sœurette, gagnée elle aussi par le charme de cette enfance innocente, le regarda de ses yeux désarmés, si pleins de pardon, qu’il ajouta doucement  :

«  Allez, mes petits, vous ne recommencerez pas, parce que vous nous feriez de la peine.  »

Lorsque Lenfant et Yvonnot eurent pris définitivement congé en emmenant Arsène et Olympe, Eugénie et Nicolas, qui s’étaient mêlés aux jeux et qui partaient à regret, Luc dut songer à rentrer chez lui, ayant terminé sa visite quotidienne. Mais, auparavant, il se souvint qu’il avait promis de voir Josine, il résolut de passer chez elle. Sa matinée était bonne, il rentrait heureux, le cœur battant d’espoir. D’abord, ce jour-là, la maison commune, avec ses tuiles vernissées et les quelques ornements de faïence qui la décoraient, lui avait paru d’une gaieté prospère, sous le limpide soleil. Les ateliers sentaient bon le travail, les magasins commençaient à regorger de provisions. Puis, c’était en lui l’espoir de voir les paysans des Combettes s’associer, élargir l’expérience, assurer le triomphe, en donnant du blé contre des outils et des machines. C’était aussi comme une promesse qui aurait suffi à tout égayer les écoles préparant l’avenir, le jardin en fête, plein d’un vol d’enfants, en qui demain fleurissait.