Page:Zola - Travail.djvu/347

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qui restaient se dévouaient jusqu’à ne pas toucher la totalité de leurs bénéfices, pour permettre à la maison de constituer un fonds de réserve considérable et solide.

Et, à cette époque critique, ce fut certainement cette solidarité de tous les membres associés, luttant pour l’œuvre commune, sauva la Crêcherie, en l’empêchant de crouler, sous l’exécration égoïste et jalouse de l’ancien Beauclair. Le fonds de réserve, si prudemment amassé, augmenté, fut d’un secours décisif. Il permit de faire face aux heures mauvaises, il évita de recourir, pendant les crises, à des emprunts mortels. Grâce à lui, on put, à deux fois, acheter des machines nouvelles, nécessitées par des changements dans la fabrication, et qui abaissèrent de beaucoup les prix de revient. Puis, quelques chances heureuses se déclarèrent, il y eut vers ce temps de grands travaux de ponts, de constructions métalliques, de voies ferrées, qui absorbèrent des quantités considérables de rails, de poutres et de charpentes. La longue paix où vivait l’Europe développait singulièrement l’industrie du fer dans ce qu’elle peut produire de pacifique et de civilisateur. Jamais encore on n’avait fait entrer à ce point le fer bienfaisant dans la maison des hommes. Et le chiffre de fabrication, à la Crêcherie, avait donc grandi, sans que les gains fussent très forts, car la volonté de Luc était de produire à bon compte, avec la pensée que l’avenir était là. Il fortifiait l’usine par une administration très sage, de continuelles économies, toute cette réserve d’argent en caisse, pouvant entrer en ligne, dès la première menace  ; et le dévouement à la cause commune, l’abnégation solidaires des travailleurs, des associés abandonnant de leur part, faisait le reste, permettait d’attendre le jour du triomphe, sans trop souffrir.

À l’Abîme, la situation paraissait très florissante, le chiffre d’affaires n’avait pas fléchi, il se menait toujours,