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une, ferait certainement beaucoup mieux, parce qu’il fallait laisser au sang des princes de ce monde le temps de se démocratiser en une descendance de plus en plus fraternelle.

Enfin, lorsque Nise eut vingt ans, et Nanet vingt-trois, les noces se firent. Elles étaient souhaitées, prévues, attendues. Depuis sept années, il ne s’était point passé un jour, sans qu’un pas fût fait vers ce dénouement de la longue et heureuse idylle. Et comme ce mariage, la fille des Delaveau épousant le frère de Josine, devenue la femme de Luc, éteignait toutes les haines, consommait le pacte d’alliance, on voulut le glorifier, en faire une fête qui célébrât le pardon du passé, l’entrée radieuse dans l’avenir. Et l’on décida que des chants et des danses auraient lieu sur le terrain même de l’ancien Abîme, dans une des halles de la nouvelle usine reconstruite, en prolongement de la Crêcherie, toute cette ville industrielle qui, maintenant, tenait des hectares et des hectares grandissant toujours.

Gaiement, Luc et Sœurette furent les organisateurs, les ordonnateurs de la fête du mariage, ainsi que les témoins, lui de Nanet, elle de Nise. Ils y voulaient un éclat de triomphe, une allégresse d’espoir enfin réalisé, la victoire même de la Cité de travail et de paix, fondée désormais et prospère. Il est bon que les peuples aient de grandes réjouissances, la vie publique a besoin de nombreux jours de beauté, de joie et d’exaltation. Luc et Sœurette choisirent donc la halle de la grande fonderie, une halle immense, avec ses marteaux monstrueux, ses gigantesques ponts roulants, ses grues puissance prodigieuse. Les nouvelles constructions, légères, toutes de briques et d’acier, étaient d’une propreté saine, d’une clarté joyeuse, avec leurs grands vitrages qui versaient à flots l’air et la lumière. Aussi laissa-t-on l’outillage en place car on n’aurait pu imaginer,