Page:Zola - Travail.djvu/557

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

boule, pareille à un astre incendiant l’horizon d’une traînée lumineuse. Et lui souriait toujours, le teint frais, sans une goutte de sueur, les membres souples et fins, en homme que trop de fatigue ne déformait pas. Déjà le chariot était allé décharger son fardeau sous le marteau-cingleur de modèle récent, actionné par l’électricité, et qui faisait lui aussi toute la besogne, sans que le forgeron chargé de le conduire eût à se casser les bras, à tourner et à retourner le massiau dans tous les sens. La danse en était si aisée, si claire, qu’elle devenait une musique accompagnant la belle humeur des ouvriers.

«  Je me dépêche, dit encore Adolphe, après s’être lavé les mains. J’ai à terminer un modèle de table qui me passionne, et je vais faire deux heures aux ateliers de menuiserie.  »

En effet, il était menuisier, en même temps que puddleur, ayant appris plusieurs métiers, comme tous les jeunes gens de son âge pour ne pas s’abêtir dans une spécialité étroite. Le travail devenait une joie, une récréation, en se variant, en se renouvelant toujours ainsi.

«  Bon plaisir  ! lui cria simplement Luc, joyeux de sa joie.

— Oui, oui, merci, monsieur Luc. C’est le mot, bon travail, bon plaisir  !   »

Mais où Luc passait quelques minutes heureuses, les matins de visites, c’était dans la halle des fours à creusets. Comme il s’y sentait loin de l’ancien enfer, les fours à creusets de l’Abîme, les fosses ardentes grondant ainsi que des volcans, et d’où les misérables ouvriers, dans une réverbération d’incendie, devaient retirer à bout de bras les cent livres de métal en fusion  ! Au lieu de la salle noire, poussiéreuse, d’une saleté immonde, s’étendait une vaste galerie que les grands vitrages ensoleillaient,