Page:Zola - Travail.djvu/595

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

grande simplicité, chacun se contentant de sa maison heureuse, les édifices publics éclataient d’une somptuosité extraordinaire, vastes à y loger d’innombrables foules, d’une commodité et d’un charme à en faire les palais du peuple, les lieux de dilection où il se plaisait à vivre. C’étaient des musées, des bibliothèques, des théâtres, des établissements de bains, de jeux, de divertissements, de simples portiques, ouvrant sur des salles de réunions, de cours mutuels, de conférences, que la ville entière fréquentait, aux heures de repos. Et les maisons hospitalières pullulaient aussi, des hôpitaux isolés pour chaque maladie, des hospices où les infirmes, où les vieillards entraient librement, des refuges surtout pour les mères et pour les enfants, qui prenaient la femme enceinte dès les mois durs de la grossesse, qui la gardaient après les couches, elle et son nouveau-né, jusqu’au retour complet des forces. Ainsi revenait et s’affirmait, dans la Cité nouvelle, le culte de l’enfant et de la mère, la mère source de l’éternelle vie, l’enfant messager victorieux de l’avenir.

«  Maintenant, conclut gaiement Bonnaire, puisque tu as fini de déjeuner, allons voir ces belles choses, notre Beauclair rebâti et glorifié, dans son éclat de fête. Je ne te ferai pas grâce d’un seul coin intéressant.  »

Ragu, résolu à ne pas se rendre, haussait d’avance les épaules, en répétant le mot qu’il croyait décisif  :

«  Comme tu voudras, mais vous n’êtes pas des messieurs, vous restez de pauvres bougres, si vous travaillez toujours. Le travail est votre maître, et vous n’êtes encore qu’un peuple d’esclaves.  »

Devant la porte, une petite voiture électrique à deux places attendait. Il y en avait de pareilles à la disposition de tous. L’ancien maître puddleur, qui, malgré son grand âge, avait gardé les yeux clairs et la main ferme, fit monter son compagnon et s’installa lui-même pour conduire.