Page:Zola - Travail.djvu/652

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besognes variées, réduites, attrayantes, les groupes se sériant, se séparant pour se rejoindre, se mêlant en un continuel jeu des libres organes, qui est la vie même. Toute la commune libertaire était en germe dans Fourier, car, s’il a répudie la révolution brutale, s’il a commencé par utiliser les rouages de la société existante, le résultat de son effort, son espoir du lendemain tendait à la destruction de cette société. Longtemps encore, le salariat avait donc agonisé, à l’usine de la Crêcherie, en passant par les états intermédiaires de l’association, le partage des bénéfices, le tant pour cent d’intérêts dans l’œuvre commune. Puis il s’était même transformé au point de satisfaire les collectivistes, le jour où il avait réalisé leur formule, toute une circulation réglementée de bons de travail. Il n’était pourtant toujours que le salariat atténué, déguisé, refusant de mourir. Et, seule, la commune libertaire l’avait détruit, emporté, en une dernière étape, celle de la délivrance par la liberté et par la justice totales, la chimère d’autrefois, l’unité, l’harmonie enfin vivantes. Aucune autorité n’existait plus, le nouveau pacte social se fondait uniquement sur le lien du travail nécessaire, accepté par tous, devenu la loi et le culte. Une infinité de groupes le pratiquaient, partis des anciens groupes du bâtiment, du vêtement, des métaux, des ouvriers industriels, des ouvriers de la terre, mais se multipliant, se variant sans fin, se pénétrant les uns les autres, de façon à se plier à toutes les volontés individuelles, à tous les besoins de la communauté. Rien n’arrêtait plus l’expansion de chacun, le citoyen évoluait à son gré dans son devoir de travailleur, faisait partie d’autant de groupes qu’il voulait, passait du travail de la terre au travail de l’usine, donnait ses heures au gré de ses facultés et de son désir. Et il n’y avait ainsi plus de lutte de classes, puisqu’une classe unique existait, tout un peuple d’artisans, également riches