Page:Zola - Vérité.djvu/113

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Et toute sa foi ardente en sa bonne besogne éclatait dans sa parole émue. L’ancien instituteur, l’ancien inspecteur primaire, clair esprit militant de connaissance et de progrès, n’avait plus eu qu’une mission, lorsqu’on lui avait donné la direction de l’École normale : préparer de bons instituteurs, acquis à la science expérimentale, libérés de Rome, enseignant enfin la vérité au peuple et le faisant capable de liberté, de justice et de paix. Tout l’avenir national et humain était là.

— Nous nous grouperons tous autour de vous, dit Marc frémissant, nous ne permettrons pas qu’on vous arrête dans votre œuvre, la plus urgente et la plus haute de l’heure présente, l’œuvre de salut.

Salvan eut un sourire de tristesse.

— Oh ! tous, mon ami, combien êtes-vous donc autour de moi ?… Il y a vous, et il y avait aussi ce malheureux Simon, sur lequel je comptais beaucoup. Il y a encore Mlle Mazeline, l’institutrice qui est avec vous à Jonville : si nous en avions quelques douzaines de pareilles à celle-là, la prochaine génération connaîtrait enfin des citoyennes, des épouses et des mères délivrées du prêtre. Quant à Férou, il se détraque de misère et de révolte, c’est une intelligence que l’amertume empoisonne… Et puis, nous en arrivons au troupeau, indifférent, égoïste, croupissant dans la routine, ne songeant qu’à flatter les chefs pour gagner de bonnes notes. Sans compter les renégats, ceux des nôtres passés à l’ennemi, par exemple cette Mlle Rouzaire, qui fait à elle seule la besogne de dix bonnes sœurs, et qui se montre si abominable dans l’affaire Simon. J’oubliais ce pauvre Mignot, un de nos meilleurs élèves pourtant, pas un méchant garçon, mais un esprit à pétrir, qui sera bon ou mauvais, selon l’influence.

Il s’animait, il continua avec plus de force :

— Et, tenez ! Doutrequin que vous venez de voir sortir