Page:Zola - Vérité.djvu/147

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c’était là le secret d’une confession, sans vouloir en dire davantage. La deuxième audience fut ensuite levée, dans la fièvre et dans un tumulte inexprimable.

Le mercredi, la question du huis clos se posa. Il s’agissait d’entendre le rapport du médecin légiste et la déposition des enfants. Le président avait le droit de prononcer le huis clos. Sans lui contester ce droit, Delbos prit la parole, démontra tous les dangers du mystère, finit par déposer de nouvelles conclusions. Paisiblement, Gragnon n’en revint pas moins avec un arrêt, que les gendarmes, dont la salle était pleine, exécutèrent tout de suite, en poussant le public dehors. Ce fut une émotion extraordinaire, une sortie en bousculade, puis des conversations passionnées, dans les couloirs. Pendant plus de deux heures, tant que dura le huis clos, la surexcitation ne fit que s’accroître. Comme si ce qui se disait dans la salle des assises eût filtré à travers les murs, de continuels renseignements, des nouvelles effroyables circulèrent parmi la foule. D’abord, on colporta le rapport du médecin légiste, on en commentait chaque terme, on y ajoutait d’affreux détails, ignorés jusque-là, prouvant l’absolue culpabilité de Simon. Puis, ce furent les dépositions de ses élèves, des petits Bongard, Doloir, Savin et Milhomme. Ce qu’ils n’avaient jamais dit, on le leur faisait dire. La certitude s’établissait qu’il les avait tous souillés ; et l’on en vint à prétendre, malgré la protestation de Delbos, de pure comédie, que les simonistes eux-mêmes avaient exigé le huis clos, pour sauver l’école laïque de tant d’ordure. Dès lors, la condamnation ne devenait-elle pas certaine ? car, à ceux que troublerait le manque de preuves suffisantes, relativement au viol et à l’assassinat de Zéphirin, on répondrait par ce qui s’était passé au huis clos, et qu’ils ignoraient. Lorsque les portes furent rouvertes, il y eut une ruée, le public rentra en tempête,