Page:Zola - Vérité.djvu/418

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de lumière qui tombait de l’abat-jour de la lampe. Et, parfois, en passant derrière sa fille, il se penchait, il lui baisait brusquement les cheveux, les yeux en pleurs.

— Oh ! mon papa, qu’as-tu donc ? disait-elle. Voilà que tu te fais encore de la peine !

Elle avait senti une larme chaude lui tomber sur le front. Elle se retournait, l’enveloppait de ses bras caressants, le forçait à se rasseoir près d’elle.

— Tu n’es pas raisonnable, mon papa, à te désespérer toujours ainsi, lorsque nous sommes seuls. Toi si vaillant dans la journée, on te dirait pris de peur, le soir, comme moi jadis, quand je ne voulais pas rester sans lumière… Puisque tu as du travail, tu devrais travailler.

Il s’efforçait de rire.

— Alors, c’est toi la grande personne sage, ma chérie… Sans doute, je vais me remettre à la besogne.

Mais, en la regardant, ses yeux s’obscurcissaient de nouveau, et il recommençait à lui baiser les cheveux, éperdument.

— Quoi donc ? quoi donc ? balbutiait-elle, attendrie, en larmes à son tour. Pourquoi m’embrasses-tu si fort ?

Et lui, frémissant, avouant sa terreur, disait la menace dont semblait l’environner toute cette ombre.

— Pourvu que tu me restes, mon enfant, pourvu qu’on ne t’emporte pas, toi aussi !

Elle demeurait sans paroles, elle le caressait, ils pleuraient ensemble. Puis, lorsqu’elle avait réussi à le faire se rasseoir devant les copies de ses élèves, elle se remettait elle-même à sa leçon d’histoire. Quelques minutes alors s’écoulaient, et il était repris de son inquiétude, il devait se lever de nouveau, pour marcher, marcher encore. Et il semblait comme à la poursuite du bonheur perdu, dans tout ce silence et toutes ces ténèbres de son foyer détruit.

L’époque de la première communion approchait, et le scandale