Page:Zorrilla - Don Juan Tenorio, trad. Curzon, 1899.djvu/148

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DOÑA INÈS

Vous lui avez dit ?…

DON JUAN

Que vous vous trouviez en sûreté, sous ma protection, et respiriez enfin librement les souffles purs de la campagne. (Brigida s’en va.)

Calme-toi donc, ô ma vie ; repose ici, et oublie un moment la triste prison si sombre de ton couvent. Ah ! N’est-il pas certain, ange d’amour, que sur ces rives écartées la lune brille plus pure et qu’on respire mieux ?

Ces brises qui vaguent dans l’air, emplies des senteurs simples des fleurs champêtres nées sur ce charmant rivage ; cette eau limpide et sereine, que croise sans crainte la barque du pêcheur attendant en chantant le jour, n’est-il pas certain, ô ma colombe, qu’elles respirent l’amour ?

Cette harmonie que le vent recueille parmi ces milliers d’oliviers en fleurs, agités par son souffle paisible ; ces accents très doux que prête à son chant le rossignol, habitant de leurs cimes, comme il appelle l’aube prochaine, n’est-il pas vrai, ô ma gazelle, qu’ils respirent l’amour ?

Et ces paroles, qui filtrent insensiblement dans ton cœur, déjà suspendu aux lèvres de Don Juan, et dont les images vont enflammer dans ton âme un feu fécond jamais encore allumé, n’est-il pas vrai, ô mon étoile, qu’elles respirent l’amour ?