Petites fantaisies littéraires/07

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Typographie de P.-G. Delisle (p. 107-115).

PENSÉES.



Quand le souffle de l’infortune a glacé son cœur, l’homme trouve dans l’amour et dans la musique, les régions de pur idéal, où s’oublient les heures et les amertumes.


La vie est un abîme où ne cessent de tournoyer des déceptions brûlantes, des ambitions méconnues, des trahisons amères ! S’il arrive à la lumière de flotter sur cette nuit, c’est Dieu qui l’envoie ; elle s’appelle : Espérance ! Elle émane de la Divinité elle-même. Vivez dans l’ordre, vous retournerez par ce rayonnement, vers les sources de l’éternelle béatitude.


En amour l’homme éprouve tant de bonheur à adorer l’objet de ses sympathies, qu’il oublie longtemps de se demander à lui-même s’il est bien payé de retour.


Selon moi, toute la beauté tient dans l’œil. Là se trouve le ressort principal qui fait jouer la physionomie.


C’est par le regard que se glissent les agissements les plus intimes de l’âme.


L’expression du regard est plus pure, plus raffinée que le langage parlé ou écrit.


Essayez d’analyser la candeur ou la mélancolie du grand œil bleu qui sur vous s’ouvre limpide, vous succomberez dans la tentative.


Quand vous êtes en présence d’une femme dont le regard vous remue profondément, ne perdez pas votre temps en observations esthétiques, dites lui ouvertement : Je vous aime ! Ça vous rendra plus heureux. Ce reflet d’infinie douceur qui s’épanouit dans son œil et vous séduit, n’est certainement pas l’expression de son indifférence.


Il est difficile que l’œil d’une femme ne la trahisse pas en face d’un observateur judicieux.


Il arrive souvent à deux personnes de s’aimer sans que jamais elles se soient rendu compte de l’espèce de plaisir qui les rapproche. Où se trouve le centre de cette mutuelle attraction ? Dans l’œil


Certains fleuves, en roulant leurs flots tumultueux, rongent à mesure les rives dont ils sont encaissés. S’il arrive aux fleurs de pousser trop au bord, le torrent les emporte, et elles s’en vont flétries, tournoyant dans l’abîme, pour ne sourdre jamais. C’est l’image du monde. L’âme virginale qui s’épanouit trop près des séductions sociales, est bientôt entraînée par elles, et tombe dans le vertige des passions.


Une opinion n’obtient de valeur qu’en raison de la position sociale de celui qui l’émet.

Elle est juste dans la tête du paria, comme dans celle du dignitaire qui l’énonce. La différence est dans le retentissement

Dans le premier cas, elle reste en deçà de la circonférence du cerveau qui l’a vu naître. Dans l’autre elle traverse les mondes.

C’est dans la nature ; les inégalités sociales sont dans l’ordre.


L’exemple est indispensable dans la société, il sert à éclairer.


Je crois qu’il n’y a rien de suave comme la prière. Elle épure l’imagination, élève l’âme, dégage le cœur de ses entraves matérielles, et met au fond de nous, le plus parfait bonheur qui se puisse atteindre ici-bas.


Le cœur de l’homme est si incliné vers les choses de la terre, qu’il est bien difficile pour ne pas dire impossible, de rencontrer des amours entièrement détachées de sensualisme.


L’amour que l’on a pour une jeune fille, diminue invariablement en raison des concessions qu’elle fait aux plaisirs.


Les poètes enveloppent le premier baiser de beaucoup de poésie ! jeunes filles ! prenez garde ! c’est le baiser fatal, parce qu’il est rarement le dernier. Ceux qui le suivent sont toujours plus dangereux, et le dégoût n’est jamais bien loin de la satisfaction. Après le dégoût, c’est le mépris, et souvent la haine a le dernier mot.


Le secret d’un amour chaste, constant, inébranlable, c’est l’austère dignité d’attitude dans les relations.


Jeune fille, cuirassez vous contre les perfides insinuations de la passion. Placez haut votre cœur, c’est-à-dire par delà l’abjecte volupté. Si jamais la fatalité dresse une rupture sur le chemin de vos illusions, il ne vous restera pas à pleurer les écarts des heures envolées.


L’élévation du cœur vers Dieu au sein des vicissitudes qui nous assaillent, procure toujours la plus douce quiétude.


L’espérance qui sort d’une larme est une prière. La prière est un endroit rapproché de Dieu. L’amour fondé sur la prière et l’espoir en Dieu, apporte à l’homme le plus parfait bonheur qui se puisse rêver en ce monde.

Je pleure, je prie, j’espère et j’aime.